L’orage s’est mis à gronder, on est rentrés dare-dare ! Une phrase familière, mais dont la familiarité évoque bien cette hâte. Mais quand même, quel drôle de mot sympathique que dare-dare... Écoutez la chronique d'Yvan Amar, avec sa transcription.
Dare-dare est un mot de l'opération Dis-moi dix mots à tous les temps.
En partenariat avec la Délégation Générale à la Langue française et aux Langues de France (DGLFLF).
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
« Allez, il faut rentrer "dare-dare" à la maison ! » Dare-dare. Très vite. Tout de suite. Dare-dare. Encore un mot qui fait partie des dix qui représentent en 2023 la langue française et qui a un rapport, donc, au temps. Dare-dare, on voit bien que c'est une expression familière. Oh, pas beaucoup... pas argotique en tout cas. Mais enfin, c'est de la langue parlée qu'on s'autorise entre amis, en famille peut-être, ou même quand on se parle à soi-même avec cette familiarité joviale. Une formule bizarre quand même, dont le sens est évident pour les francophones, ça veut dire « très vite », mais qui n'évoque pas d'image. Elle est expressive pourtant, mais par le son : elle parle plus à l'oreille qu'à l'œil. Mais enfin, elle a ce côté rapide, lié d'abord à son côté monosyllabique : dare-dare. Comment ça, monosyllabique ? Il y en a deux, des syllabes... Oui, certes, mais c'est la même syllabe répétée comme pour presser le mouvement. On dit dare-dare comme on dit : « Vite, vite ! Allez, allez, pressons, pressons ! »
Alors, d'où vient l'expression ? C'est ça aussi qui fait le charme de la langue française. En fait, on en sait trop rien. Elle est pourtant ancienne. On en trouve des traces depuis le XVIIᵉ siècle, ce qui peut être étonnant pour une expression qui appartient bien plus à l'oral qu'à l'écrit. Parce que jadis, l'écrit se cantonnait, se limitait en général à des mots de la langue surveillée parce qu'on écrivait moins et que lecture et écriture étaient réservés à une catégorie assez réduite de la population.
Alors, revenons à notre dare-dare. On a quand même une petite idée de son origine, même si on n'est pas certain que ce soit vrai. Et on pense au « dard », le dard -D.A.R.D, ce mot qui évoque non seulement quelque chose qui appartient à certains insectes, les guêpes, les abeilles, mais qui évoque aussi une arme qu'on lance, un javelot ou même une flèche. Une flèche qui file pour atteindre sa cible. Dare-dare, rapide comme une flèche, alors ? Bah, pourquoi pas... Et bien entendu, ce genre d'expression a des équivalents dans la langue familière tout autant. « Fissa » par exemple, un mot qui nous vient de l'arabe qui est apparu en français au début du XXᵉ siècle, donc c'est de l'argot colonial. À l'origine assez honteuse il faut bien l'avouer... Mais enfin, son ancienneté l'a fait oublier et ce mot fait partie de ce langage du tutoiement, que ce soit celui de la camaraderie ou du commandement un peu méprisant. « Allez, tu vas me faire ça dare-dare ! Tu vas me faire ça fissa ! » On sent quand même un commandement assez rude, mais depuis le temps que le mot est apparu en français, aujourd'hui, c'est un peu poli, un peu adouci, disons.
إظهار أقل إظهار أكثر