Vide, vide institutionnel, ventre vide, bourse vide...
Le mot « vide » est à l'origine de nombreuses expressions. Yvan Amar nous explique tout dans sa chronique Les mots de l’actualité.
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► EXERCICE - Chronique Les Mots de l'actualité du 11 juin 2020
► LEXIQUE
La langue : une formule ; une image ; une expression ; figuré/figurée ; un adjectif ; un nom.
La politique : un président/une présidente ; un vide institutionnel ; l'Assemblée nationale ; un successeur ; la Constitution ; le pouvoir ; un général ; un vide politique ; une élection.
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Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
La mort soudaine du président du Burundi, Pierre Nkurunziza, prend un peu tout le monde de court, c'est très inattendu ! Est-ce que pour autant le pays va se trouver face à un vide institutionnel ? C'est la question que posait RFI, et c'est même la formule utilisée par les journalistes de RFI : « un vide institutionnel». Sachant d'ailleurs que ça ne devrait pas être le cas au Burundi. A priori, Pascal Nyabenda, président de l'Assemblée nationale, pourrait assurer l'intérim jusqu'au mois d'août. Et puis, de toute façon, le successeur de Nkurunziza était déjà désigné. Evariste Ndayishimiye devait prendre sa place, dans une situation, d'ailleurs à l'équilibre audacieux, potentiellement tangent puisque Nkurunziza devait garder une position officielle importante. Mais, en principe, on connaît le nom du prochain président du Burundi que, justement, Pierre Nkurunziza ne sera plus là pour gêner aux entournures.
Alors, quand on parle de « vide institutionnel », on sait bien de quoi il s'agit : une situation imprévue par la Constitution. Que faire dans ce cas-là ? Mais ce n'est pas le cas au Burundi en ce moment. Et lorsqu'on parle de « vide politique », là encore, on sait à quoi s'en tenir : une chaise vide, personne pour s'asseoir dessus, c'est-à-dire personne pour assurer le pouvoir. Et on se rappelle le mot sarcastique de de Gaulle alors qu'il n'était même pas à la fin de sa vie ni de ses responsabilités politiques. C'était en 1962, lorsqu'il évoquait « ce qui arriverait quand de Gaulle aurait disparu », disait-il, car il parlait parfois de lui à la troisième personne. Eh bien, « ce qui est à redouter, à mon sens », disait le général de Gaulle, « après l'événement dont je parle, ce n'est pas le vide politique, c'est plutôt le trop plein ! » Et donc, avec ironie, il imaginait la pagaille et l'ambition effrénée qui pourraient succéder à son départ. Ce qui n'a pas vraiment été le cas d'ailleurs, puisqu'il a démissionné en 1969, et qu'Alain Poher a assuré l'intérim avant l'élection de Georges Pompidou.
Donc, le vide, c'est une image spatiale qui évoque l'absence. Physiquement, techniquement, il s'agit du rien, du rien du tout. Si l'on arrive à faire le vide dans une bouteille, c'est qu'on a réussi à en extraire tout ce qui était à l'intérieur, tous les gaz. Alors, ce vide intégral, pour reprendre l'expression consacrée, on peut s'en rapprocher, probablement sans jamais l'atteindre.
Mais, bien sûr, on utilise le mot de façon figurée : « avoir le ventre vide », par exemple, c'est n'avoir rien mangé depuis un certain temps. Si « ma bourse est vide », c'est que je suis sans argent. Si « la ville semble vide », c'est qu'on voit fort peu ses habitants dans la rue. Et de façon plus figurée encore, le mot renvoie à l'idée d'une absence que souvent on va regretter. C'est-à-dire qu'on utilise le mot non plus comme un adjectif, mais comme un nom : on parle du « vide de ma vie », du « vide de mes relations amoureuses », c'est-à-dire du firmament tristement vide de mes amours du moment, pour citer un poème bien connu.
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