La proximité de la Coupe du monde de football met le Qatar sous le feu des médias. On parle donc beaucoup de cet émirat. Mais qu'est-ce qu'un émir ? D'où vient ce mot ? L'émir est un mot qui a voyagé dans l'Histoire, puisqu'il a pour cousin le mot... amiral ! Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
La proximité de la Coupe du monde de football met le Qatar sous le feu des médias, donc on parle beaucoup de cet émirat, parce que le Qatar en est bien un parmi tous ceux qui émaillent la péninsule arabique. On parle couramment des émirats du Golfe, qu'ils fassent ou non partie des Émirats arabes unis, on est donc chez les émirs. Mais ces émirs, ils existent depuis longtemps, bien avant qu'on leur ait attribué une fonction officielle. Avant d'être un chef d'État, un émir, c'est un chef, un chef de tribu, un prince. Et pendant longtemps, c'était un titre dont pouvaient s'enorgueillir les descendants de Mahomet. Le mot ne s'est donc pas cantonné au monde arabe et, moyennant quelques changements, il est passé à l'étranger, puisque le mot « amiral » qu'on trouve en français dérive tout droit de l'émir. Alors, l'amiral, il n'est pas récent non plus. Il apparaît dès le XIᵉ siècle, ça fait 1000 ans dans « La Chanson de Roland », par exemple. Et le mot désigne d'abord « le chef des ennemis », c'est-à-dire « celui qui est à la tête des Sarrasins », dans la logique de Charlemagne. Mais le mot a joué les transfuges et il a changé de camp pour désigner un chef d'armée d'abord, et plus précisément « le chef de la flotte ». Et encore aujourd'hui, l'amiral, il reste dans la marine. Ce grade correspond à celui de général dans l'armée de terre ou l'armée de l'air. De même qu'on a plusieurs variétés de généraux, on en a plusieurs pour les amiraux : vice amiral, contre-amiral, etc. Mais il y a une différence d'étiquette importante entre l'amiral et le général. On dit : « mon général », quand on parle à un général. Pour s'adresser à cet officier on dit : « mon général ». On ne dit jamais : « mon amiral ». Alors, notons aussi que le « mon » n'est pas vraiment un possessif, c'est une abréviation de Monsieur. On dit « Monsieur le Général » quand on dit « mon général », mais on ne dit pas « Monsieur l'Amiral ». Alors ce le mot « amiral », il peut servir aussi d'adjectif, parfois au sens propre. Le navire amiral, c'est le plus important de la flotte, celui qui est censé guider, conduire les autres. Par exemple, la Santa-Maria est donnée comme le navire amiral de l'expédition de Christophe Colomb, plus importante, ouvrant les chemins aux autres qui était la Pinta et la Niña, et en plus la Santa Maria avec Christophe Colomb à son bord, c'est dire. Et au figuré, on utilise régulièrement cette image. Si une société a plusieurs filiales, la plus importante peut être qualifiée de « vaisseau amiral », ce qui donne l'image non pas d'une structure qui domine, qui commande, mais de celle qui donne fièrement l'exemple. Par exemple, la « collection blanche » est, peut-on dire, le navire amiral des éditions NRF. Et si l'on revient à notre émir, il a quelques concurrents dont le sens est légèrement différent, mais qui, en français, évoque des fonctions un peu analogues le cheik le calife en général plus important, qui littéralement signifie « le successeur », et puis enfin le sultan.
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