Une cyberattaque parrainée par la Chine… Est-ce vraiment une accusation ? Et quel peut être le rôle de la Chine si elle parraine ce genre d’opération ? Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
En partenariat avec la Délégation Générale à la Langue française et aux Langues de France (DGLFLF).
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Une cyberattaque parrainée par la Chine. C'est ainsi que les médias francophones, RFI en particulier, présentent l'événement avec ce mot d'un usage assez subtil : parrainé par la Chine. On ne dit pas que l'attaque contre les systèmes informatiques américains dans des secteurs très divers a été menée par la Chine. On dit encore moins qu'elle a été réalisée, exécutée par la Chine. Mais on pointe une responsabilité de façon indirecte.
Et le mot parrainé est assez flou. Il accuse sans accuser. La phrase précise clairement que ces attaques n'ont pas été menées par l'État chinois. Est-ce qu'on dit que la Chine est à l'origine des actions ? Non, pas vraiment non plus : il n'est pas précisé qu'elles aient été commanditées par ce pays qui n'est pas un donneur d'ordre. Mais la Chine aurait parrainé...
Alors lointainement ce mot, parrainer, s'apparente au domaine religieux. Et de façon figurée, la formule se souvient de cette filiation. Un peu comme si on avait dit, et là encore de manière figurée : avec la bénédiction de la Chine, une cyberattaque a ciblé des systèmes informatiques, etc. Donc, la Chine est d'accord avec l'acte accompli. On sous-entend même qu'elle en a soufflé l'idée. À l'extrême rigueur, elle a prêté les moyens techniques, mais en tout cas, elle ne va pas revendiquer l'action. Peut-être même va-t-elle proclamer qu'elle n'a rien à voir avec tout ça.
Mais le verbe parrainer, il est fréquent, il a bien d'autres usages, même au figuré. On entend couramment dire, par exemple, qu'une personnalité a parrainé une manifestation, un festival. Cela veut dire qui lui accorde son autorité morale, il le prend sous sa protection, son souhait de bonne santé, de réussite. On retrouve là cette idée de bénédiction. Et en général, c'est un honneur revendiqué, une fierté et un gage de respectabilité de pouvoir afficher ces parrainages : c'est une reconnaissance. Un parrainage, c'est un soutien, et pas toujours uniquement moral : il peut s'agir d'une aide financière.
C'est le cas quand, par exemple, une entreprise ou un particulier finance une aventure avec en contrepartie un certain affichage. Par exemple, les bateaux qui se lancent dans des traversées risquées sont souvent parrainés : le navigateur n'a pas assez d'argent personnel pour s'équiper, il se fait aider. Et le fabricant de chaussures ou la banque qui le soutient aura en contrepartie son nom et son logo, l'image qui le représente, bien en place sur la voile de l'embarcation. Et si le pari est réussi, le prestige, l'image du succès vont retomber sur le parrain, qu'on appelle parfois en anglais latinisant : un sponsor. Et précisément, c'est pour éviter cet anglicisme que l'on nous recommande le mot parrainage.
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