Coude, au coude à coude, huile de coude...
Le coude permet au bras de se plier, c'est un fait ! Mais il est aussi à l'origine de plusieurs expressions. Yvan Amar nous explique tout dans sa chronique Les Mots de l'actualité !
Publicado em:
► EXERCICE - Chronique Les Mots de l'actualité du 27 septembre 2021
► LEXIQUE
La langue : une image ; une expression ; symboliser ; un écho ; une évocation ; négatif/négative.
Le mouvement : un coureur ; courir ; devancer ; une course ; une marche ; se déplacer ; se frayer un chemin ; tailler sa route.
► DOCUMENTS À TÉLÉCHARGER
► TOUS LES ÉPISODES DU PODCAST SUR RFI
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
C'était hier une journée d'élection en Allemagne, très préparée, très attendue, très commentée. Et pour ce premier tour d'un scrutin qu'on a dit d'abord indécis, ensuite haletant, et enfin plein de suspense, on a fini avec deux formations au coude à coude, les sociaux-démocrates et les conservateurs.
Alors, l'image qui vient spontanément à l'esprit, c'est celle de deux coureurs qui courent de concert, ou de concerve, on peut dire les deux. Aucun ne devance vraiment l'autre. C'est comme si leurs coudes pouvaient se toucher pendant la course. On a même l'idée que cette indécision dure pendant une bonne partie de cette épreuve, pas uniquement à quelques mètres de l'arrivée. Et l'image est transparente. Pourtant, ce n'est pas le premier sens qu'on lui a donné.
Au départ, cette expression était davantage associée à la marche qu'à la course, symbolisant plutôt la solidarité, l'action commune, proche en cela d'une autre : « se tenir les coudes » ou même « se serrer les coudes ». On voit d'ailleurs que c'est la même image. Dans le cas qui nous intéresse, le sens de l'expression est presque retourné : on est dans une situation de concurrence et pas d'entraide. Alors que quand on se serre les coudes, c'est qu'on s'aide les uns et les autres.
Et cette présence du coude, et d'ailleurs d'une allusion à la posture, à la façon de se tenir, se retrouve dans d'autres formules, qui se comprennent par rapport à une représentation du corps en mouvement quand on se déplace. Quand « on joue des coudes » : c'est qu'on se fraye un chemin dans une foule, en écartant les gêneurs de façon d'ailleurs assez musclée : on taille sa route.
Le geste est différent quand « on lève le coude » : cela évoque le verre qu'on boit. Et la phrase peut avoir plusieurs échos : « Oh, hier, on a bien levé le coude ! » C'est ponctuel : on a bu un peu plus qu'on aurait dû. Mais si on dit de quelqu'un qu'il « lève le coude » sans autre précision, c'est qu'il a l'habitude de le faire : il a un penchant pour la bouteille. Non, pas une ébriété d'un soir, mais un alcoolisme installé.
Et, si le coude qui se lève est bien l'image du verre qu'on vide, « l'huile de coude » fait penser à autre chose. L'huile de coude, on sait que ça n'existe pas. Si ça existait, qu'est-ce que ça serait ? Ça servirait à lubrifier l'articulation du bras et de l'avant-bras. Donc, à faciliter l'effort. C'est une évocation du travail manuel, fatigant, parfois difficile, mais en tout cas musculaire. Et on peut terminer avec « se moucher du coude ». Une habitude qui nous est familière aujourd'hui parce qu'elle fait partie des fameux gestes-barrières qu'on nous a recommandé d'adopter pour éviter à l'épidémie de se propager. Mais au départ, la phrase, à la négative, donne étrangement une idée de prétention et de snobisme : « Oh, il ne se mouche pas du coude », c'est-à-dire, il ne se prend pas pour rien, le roi n'est pas son cousin.
Ver menos Ver mais