Les réquisitions ne passent pas, annonçait hier RFI. Et en effet, ces décisions gouvernementales sont mal vécues par les grévistes des raffineries françaises : que sont donc ces réquisitions ? Le sens du mot se comprend aisément lorsque l’on pense à son origine : s’il y a réquisition, c’est qu’une requête est faite. Et ce mot réquisition a un autre emploi totalement différent, dans le monde judiciaire. Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la Délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Les réquisitions ne passent pas. Voilà un titre que j'ai entendu hier sur RFI. En effet, il y a quelques décisions gouvernementales récentes en France qui sont mal senties, mal perçues par les grévistes des raffineries françaises. Alors de quoi s'agit-il quand on parle de réquisition ? Quelques grévistes, parmi les travailleurs des raffineries en grève, ont été sommés d'aller travailler, c'est-à-dire obligés d'aller travailler pour que les stocks puissent être débloqués et que la chaîne de la distribution du carburant ne soit pas totalement arrêtée. C'est-à-dire que malgré leur position de grévistes, malgré leur droit de grève qui, sur le principe, n'est pas remis en cause, on leur ordonne d'aller travailler quand même, on les réquisitionne. Une réquisition, c'est donc l'exigence qui est faite par l'administration publique pour qu'un certain travail lui soit consacré. Mais attention, souvent, on parle aussi de réquisition de biens. Dans une situation urgente, les pouvoirs publics peuvent se saisir de quelque chose pour l'utiliser. Ils n'en deviennent pas propriétaires, mais enfin ils s'en servent pendant un temps donné pour un usage particulier, on peut réquisitionner des locaux, des appartements, des machines... Et on a tous en tête des images de cinéma ou de romans dans lesquelles on voit la police qui réquisitionne une voiture, par exemple, pour se lancer à la poursuite des bandits.
Alors, le sens de ce mot se comprend aisément quand on pense à son origine. S'il y a réquisition, c'est qu'une requête a été faite. Les deux mots sont de la même famille et dans cet usage-là, la requête, c'est la demande, mais la demande exigée. Et le verbe requérir a gardé ce sens fort d'obligations, alors que le nom requête, la plupart du temps, pas toujours, mais le plus souvent, il a une nuance bien différente. Quand on parle de requête, c'est compris, c'est qu'on sollicite comme si on demandait une faveur. Pour la réquisition, ah, c'est autre chose. La personne réquisitionnée n'a pas le droit de refuser.
Et ce mot réquisition ? Il a d'ailleurs un autre emploi qui est totalement différent et qui appartient au monde judiciaire dans le cadre d'un procès. La réquisition, c'est la peine qui est évaluée et donc proposée par l'accusation. C'est la conclusion de ce qu'on appelle le réquisitoire. Encore un mot de la même famille. C'est, le réquisitoire, c'est le discours qui est fait devant la cour par un procureur qui représente l'institution judiciaire et qui, en justifiant, va donner son avis sur la culpabilité de ceux ou celles qui sont mis en examen. Le procureur propose une peine qu'il pense juste. Et puis, le juge ou les jurés entendent cet avis du procureur. Ils ne sont pas obligés de le suivre, ils ont le choix de ne pas suivre les réquisitions. Ils peuvent aller au delà, c'est-à-dire être plus sévères. Ou bien, ils peuvent être moins sévères, condamner moins lourdement que ce qui est demandé dans le réquisitoire, ou même acquitter le prévenu, c'est-à-dire l'accusé.
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