Il y a quelques jours, un député républicain américain déclarait que, en raison de la récession, le gouvernement ne devait pas donner de chèque en blanc à l'Ukraine. Qu'est-ce que ça veut dire, donner un chèque en blanc ? Il s’agit, bien entendu, d'une expression figurée, il n'y a pas de vrai chèque. Seulement au sens propre, un chèque en blanc, ça existe bien. Et sur le modèle du chèque en blanc, on parle parfois, et c'est très différent, de chèque en bois. Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la Délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Il y a quelques jours, un député républicain américain, Kevin McCarthy, déclarait que, en raison de la récession, le gouvernement ne devait pas donner de chèque en blanc à l'Ukraine. Et depuis, d'ailleurs, il a été suivi par quelques autres, hein. Qu'est-ce que ça veut dire ? Donner un chèque en blanc signifie qu'on accepte tout, qu'on dit oui à tout a priori, sans se donner de droit de regard, de droit de réserve ni de droit de critique même. Et bien entendu, il s'agit d'une expression figurée, là-dedans, il n'y a pas de vrai chèque. Seulement au sens propre, un chèque en blanc, ça existe bien, ça veut dire quelque chose. On peut donner un chèque en blanc à quelqu'un : il s'agit d'un chèque qu'on a signé, qu'on a daté ou pas, avec éventuellement un ordre, c'est-à-dire le nom du bénéficiaire, seulement le montant du chèque n'est pas indiqué et ne figure pas sur le document. Donc, c'est tout à fait imprudent de faire un chèque en blanc, même si on a toute confiance aux gens à qui on le donne, hein. Imaginez que la direction de RFI me donne un chèque à mon nom sans mettre la somme... Je serais bien tenté de l'utiliser en inscrivant 50 000 €... Et dans cet usage, en blanc signifie simplement qu'on n'a rien inscrit sur la ligne où l'on doit écrire la somme. On l'a laissé en blanc, c'est-à-dire qu'on a laissé libre l'espace prévu pour cette précision. En blanc, c'est-à-dire en creux si vous voulez, en vide. Mais, je pense que personne ne fait de chèque de ce genre. Alors bien sûr, la formule est surtout utilisée au figuré et à la négative, pour mettre en garde. Oh ! Attention, il ne faut pas donner un chèque en blanc à tel parti lors d'une alliance politique, c'est-à-dire être à l'avance d'accord, quelles que soient les orientations du parti en question.
Et sur le modèle du chèque en blanc, on parle parfois, et c'est très différent, de chèque en bois. Alors là, il ne s'agit pas d'un usage figuré. Enfin, si un peu : le chèque n'est pas vraiment en bois, mais enfin il s'agit bien d'un chèque, un chèque qui est donné comme moyen de paiement. Et si l'on dit qu'il est en bois, on veut dire de façon familière et plaisante qu'il est sans provision. Si je fais un chèque de 1 000 €, mais que je n'ai pas cette somme sur mon compte, le chèque ne peut pas être payé. Il est en bois.
Quant au mot chèque lui même, il date du Moyen-Âge et il nous vient d'Angleterre. Il s'agit d'un papier dont on peut vérifier la validité. Vérifiée, en fait, c'est l'un des sens du mot « check » en anglais. Un peu comme si c'était un papier qui était certifié. Et ce chèque succède à ce qu'on a appelé des lettres de change, inventées quand le commerce se développait en Europe au Moyen-Âge, en particulier dans les grandes foires à partir de la fin du XIIᵉ siècle, début XIIIᵉ. Ça, c'est l'époque dorée de ces premières lettres de change, avec ces foires de Champagne, de Bourgogne, de Flandre où se développait une pratique qui reposait sur une confiance commerciale entre l'acheteur et le vendeur.
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