Barayé, cette chanson en persan est chantée par de nombreuses personnes en soutien à celles et ceux qui osent manifester en Iran. C'est un chant de revendication qui se fait entendre « pour », et non pas « contre ». Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la Délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Barayé Barayé. La prononciation n'est pas toujours parfaite, surtout quand c'est moi qui prononce ce mot là. Mais justement, cette chanson qui s'appelle Barayé a été écrite en persan. Mais elle n'est pas uniquement chantée par ceux ou celles qui savent cette langue. Vous venez d'en avoir la preuve, mais justement, beaucoup la chantent. Des Iraniens, des Iraniennes et bien d'autres en soutien à celles et ceux qui osent manifester en Iran et se dresser face à l'intolérance, face à la violence d'une police des mœurs, d'une police des vêtements et même d'une police de la pensée, il faut bien le dire.
Barayé, voilà une chanson qui s'affirme pour danser dans la rue, pour la peur d'un baiser, pour ma sœur, la tienne, la notre, comme c'est traduit sur RFI. Et c'est bien là, la force de ce mouvement et surtout de cette chanson. Elle est « pour ». C'est ça le sens du mot « barayé ». C'est un chant de revendication qui se fait entendre « pour » et non pas « contre ». Alors que la plupart du temps, on manifeste « contre », contre la vie chère, contre les licenciements, contre la censure, etc. Mais là, grâce à ce retournement positif, en chantant sous les menaces, devant le danger, on est quand même « pour » et on est là face à un mot qui regarde en avant et qui regarde vers l'avenir. « Pour », c'est à dire en faveur de, destiné à soutenir quelque chose, à promouvoir quelque chose.
« Pour », par définition, c'est une préposition positive. Si l'on est pour quelque chose, c'est qu'on souhaite que cette chose advienne. Un pique nique? Ben oui, je suis, je suis pour. Bon, il est vrai que si l'on veut rester tout à fait correct, on ne doit pas terminer en français une phrase par une préposition. Moh enfin, dans un français un peu familier, assez sympathique, on l'entend souvent. Oui, oui, je suis pour. Et c'est bien agréable d'être pour, de courir pour la paix, de défiler pour la justice, etc. Je te prive de dessert. C'est pour ton bien. Tu me remerciera plus tard, comme disent toujours les parents. Et si l'on est pour quelqu'un, que ce soit avant un match ou avant une élection, c'est qu'on désire que ce quelqu'un gagne. Parfois, la préposition peut même être suivie d'un verbe à l'infinitif. Je suis pour attendre encore un peu. Eh bien moi, c'est le contraire, je suis pour me baigner tout de suite. Et le mot, bien entendu, a d'autres usages. La destination, par exemple, figuré, c'est pour moi. C'est pour lui, une cuillerée pour papa, une cuillerée maman, etc.
Mais enfin, elle peut aussi bien être littérale cette destination, c'est le train pour Aix en Provence et on peut glisser tout doucement du lieu au temps. Je prends le train pour Aix parce que je pars pour quelques jours. Et le mot peut marquer également l'équivalence dans une relation d'échange. Un mal pour un bien, risquer le tout pour le tout. Ou bien il sert à évaluer. J'ai eu tout ça pour 10 €. Ou bien le mot exprime le fait de prendre la place de quelqu'un d'autre. J'ai beau prendre un air sévère et mettre des décorations sur mon plastron, on ne m'a jamais pris pour le roi de Prusse.
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