Le secteur du « care » - qui regroupe toutes les professions médiales ou paramédicales au sens large - est une nouvelle tendance du vocabulaire français. C'est un anglicisme de plus qui circule dans notre langue. On pourrait le traduire par soin, ou souci par exemple, mais sa traduction littérale en français n'est pas si nette que cela, car ce mot est un concept qui nous vient d'ailleurs... Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
« Toute sa vie, elle a travaillé dans le "care" ». Voilà une phrase que j'ai entendue récemment. Est-ce que je l'aurais entendue il y a une quinzaine d'années ? Ou même dix ? Probablement pas, parce qu'il s'agit d'une nouvelle tendance du vocabulaire français, un anglicisme de plus qui circule dans notre langue. Alors on va s'intéresser à son sens, qui est plutôt sympathique, parce que le secteur du « care », et on l'écrit « C. A. R. E. », c'est donc un mot anglais. Eh bien, ce secteur regroupe toutes les professions médicales ou paramédicales au sens large. Donc il s'agit des médecins bien sûr, ou des chirurgiens, ou des dentistes, mais aussi des infirmiers, des aide-soignants, des kinésithérapeutes ou des psychologues, ou des assistants sociaux, ou même peut-être de ceux qui, le soir, font des maraudes dans les grandes villes, c'est-à-dire qui circulent pour venir en aide aux SDF, à ceux qui n'ont rien, qui sont perdus ou menacés. Et les conseillers matrimoniaux alors ? Et les coachs ? Encore un anglicisme fréquent. Et les voyantes ? Est-ce qu'ils appartiennent au « care » ou bien ils sont à la limite ? Mais d'un pas, il pourrait s'y abriter. Et on voit bien que le sens de ce mot est large, qu'il englobe tout ce qui est susceptible d'aider son prochain, son prochain inconnu, parce que si on aide son fils, sa fille, sa mère, est-ce que c'est vraiment du « care » ? Non. On va considérer que cela découle d'un sentiment affectueux mais tout à fait ordinaire et légitime.
Alors comment traduire ce « care » qu'on prononce à la française ? On dit pas /keər/. Comme on le traduit en français, ce n'est pas facile. Pour une raison assez simple cette notion qui est née aux États-Unis, elle correspond vraiment à un état d'esprit, à une mentalité américaine. L'idée n'est pas tellement française. Alors on peut quand même essayer de trouver une traduction, proposer par le mot « soin », qui convient assez largement. Pas tout à fait, parce que le soin reste quand même en français, lié à l'idée de « soigner » dont il dérive. Alors que le « care », ça recouvre une aide beaucoup plus large et beaucoup plus vague, c'est aider. Aider par son attention, souvent. Et pourtant, en français, le mot de « soin », il recouvre celui d'attention. On prend soin de sa personne, de ses proches, de sa maison, de ses livres, etc. C'est-à-dire qu'on veille à ne pas les abîmer, à les conserver en bon état. Mais les deux emplois de ce même mot « soin », sont relativement dissociés. Alors, on pourrait peut-être penser au « souci », qui en est assez proche. Seulement ce joli mot a été tiré vers une signification plutôt négative, même si le « souci de soi » correspond à cette idée de respect de soi, de conscience de son bon état. Mais le sens du mot rejoint le plus souvent celui de préoccupation, inquiétude, souvent légitime. Et en plus, ce mot de « souci », il est au cœur d'un effet de mode très fort dans un langage plutôt jeune, et on l'emploie souvent à la négative. « Pas de souci ! ». Ce qui veut dire « Ne t'inquiète pas, tout va bien ! » Et on y retrouve parfois un pseudo anglicisme plaisant : « No souci ».
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