«Camaïeu», un mot plein de nuances ! Un camaïeu est au départ une pierre à deux teintes, du fait de la superposition de deux couches de matières. Comme ce mot l'indique, «camaïeu» a d'autres synonymes qui apportent une subtilité. On peut par exemple parler de dégradé. Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
La liquidation judiciaire de l'entreprise française Camaïeu met en difficulté une bonne partie de l'activité textile au Maroc. C'est une nouvelle qu'on apprend par RFI. Ce n'est pas une bonne nouvelle, mais elle met en avant ce nom de « camaïeu ». « C.A.M.A.Ï.E.U », nom propre dans ce cas-là, puisque c'est celui d'une entreprise qui dérive d'un nom commun français. Nom commun, c'est-à-dire substantif qui n'est pas si fréquent, c'est-à-dire il n'est pas si commun que ça. Camaïeu, c'est un mot qui appartient surtout au vocabulaire de la peinture, un vieux mot français d'origine assez floue, apparenté visiblement au mot camée, « C.A.M.É.E » Et on voit que l'origine est à chercher non pas dans la peinture, mais dans la langue des pierres précieuses. Car un camée, c'est une pierre, et un camaïeu, c'est au départ une pierre qui a deux teintes, du fait de la superposition de deux couches de matière qui ont deux couleurs légèrement différentes. Alors, le mot est ainsi passé dans le monde des peintres pour désigner une œuvre qui est faite de plusieurs nuances à partir d'une même couleur. Et au départ, c'est une œuvre qui est toute faite de gris, de blanc et de noir. Alors ensuite, on a admis d'autres teintes. Et aujourd'hui, on parle surtout de camaïeu pour désigner les couleurs d'un habillement, un camaïeu de bleu, un camaïeu de vert, c'est-à-dire quelqu'un par exemple qui a mis pour être élégant une chemise vert d'eau, un pantalon vert amande et un pull vert foncé. C'est tout un nuancier qui se décline comme ça. Et on comprend bien pourquoi ce mot avait été choisi pour nommer une entreprise de vêtements. « Il est un peu précieux, un peu ancien et très imagé ». Alors que ce soit pour décrire une tenue vestimentaire ou un paysage, on peut se demander si le mot a des synonymes. Il en a quelques uns qui, comme tout bon synonyme, ne sont pas absolument de même signification. Alors, de même qu'on parle de Camaïeu, on peut parler de dégradé. Là encore, on évoque des nuances différentes à partir d'une même couleur de base, mais on a une idée de hiérarchie d'une certaine façon, on va du plus clair au plus foncé ou même plus souvent du plus foncé au plus clair, comme si on allait en fait vers le blanc, vers l'absence, vers la disparition. Au bout du dégradé, on n'a plus rien, on ne voit plus rien. C'est comme une évolution, mais linéaire. Alors on peut également employer l'expression « ton sur ton » qu'on entend également à propos d'un habillement hein: si on a une chemise rose sous un gilet bordeaux, eh bah on est habillé ton sur ton. Alors que le glacis évoque autre chose. C'est un mouvement vers l'intérieur qui donne souvent une impression de profondeur. Là encore, c'est un terme de peinture et on appelle glacis - « G.L.A.C.I.S » - un procédé qui ne concerne au départ que la peinture à l'huile. On recouvre une couche de peinture sèche d'une seconde, très fine, qui, par un effet de transparence, laisse apparaître la première. Mais enfin les deux feuilles superposées peuvent être de couleurs différentes. Pour obtenir un effet, on a quitté l'univers du monochrome, qui caractérise davantage le camaïeu ou le ton sur ton.
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