L’une des expressions les plus lourdes de sens, en ce lendemain de finale de Coupe du monde, c’est bien sûr « tir au but », puisque ce sont ces fameux tirs qui ont départagé les deux équipes vedettes. En la décomposant, on la comprend très bien : on tire au but, c’est-à-dire vers le but, en direction du but, pour atteindre le but. On retrouve cette action de tirer dans d’autres pratiques : à la pétanque, on tire ou on pointe ? ; au maniement d’une arme, le tir au fusil, le tir à l’arc… Mais aussi dans des emplois figurés : tirer les ficelles, c’est-à-dire manipuler une situation… Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
L'une des expressions les plus lourdes de sens aujourd'hui, en ce lendemain de finale de Coupe du monde, bien sûr, c'est « tir au but » puisque ce sont ces fameux tirs qui ont départagé les deux équipes vedettes. Inutile d'expliquer ce que c'est, tout le monde le sait, surtout en ce jour, d'autant que cette expression, on la comprend très bien en la décomposant : on tire au but, c'est-à-dire vers le but, en direction du but, pour atteindre le but.
Et ce mot de tir, évidemment, il désigne une frappe de balle forte, directe, le plus souvent pour tenter de marquer. Et ce côté direct et droit et énergique, on va le rencontrer dans d'autres pratiques sportives, souvent, notamment les boules, la pétanque. On tire ou on pointe ? Souvent, d'ailleurs, on dit on tire ou on pointe. Ce vocabulaire est connu de ceux qui savent jouer, mais aussi de ceux qui ne savent pas jouer et qui miment les joueurs de façon presque parodique, qui miment les joueurs et même leur origine supposée, avec une sorte de mythologie à gros traits du midi. Mais il est vrai que pointer, ça désigne la tentative de lancer la boule pour qu'elle se place au plus près possible du cochonnet ou du bouchon, ou du but - on a plusieurs mots pour cette petite bille -, alors que tirer, c'est lancer sa boule fort en s'en servant comme d'un genre de projectile pour éloigner une boule adverse et rivale ou éventuellement en prendre la place.
Mais bien entendu, le tir fait aussi souvent référence au maniement d'une arme et on voit, là, la diversité de sens de cette préposition à ou au : le tir au but, il est orienté vers le but, orienté dans l'espace ; le tir au fusil, à la carabine, ça indique simplement le moyen, l'instrument. Est-ce que tout cela vaut uniquement pour les armes à feu ? Ben non, pas du tout, parce que couramment on va parler de tir à l'arc, et on en parlait bien avant qu'on parle, évidemment, du tir au pistolet.
Si on y réfléchit, ces emplois sont quand même assez étonnants parce que les premiers sens du verbe tirer évoquent un mouvement opposé : aller de l'extérieur vers l'intérieur, tirer quelque chose vers soi, tirer l'eau du puit, tirer les marrons du feu... Donc, rapprocher l'objet en question. Même dans certains emplois figurés, on trouve la même chose : tirer les ficelles, c'est-à-dire manipuler une situation sans que les autres le sache, comme un marionnettiste invisible. Comment est ce que tout cela peut s'expliquer ? Eh bien, revenons à notre tir à l'arc : pour envoyer la flèche, on tire sur la corde au premier sens du verbe, on la tire vers soi et ce geste détermine le choix du verbe. Alors, à partir de là, par extension, on a pu parler de tirer au mousquet ou au canon, ou même, dit-on, de tirer des feux d'artifice.
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