Les droits humains, un angle mort dans les relations diplomatiques franco-algériennes ! Une formule de journaliste bien sûr… Mais que signifie-t-elle et d’où vient-elle ? Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Les droits de l'homme, l'angle mort des relations diplomatiques entre l'Algérie et la France. Cette phrase, je l'ai entendue sur RFI tout récemment. Elle m'a intriguée. Elle m'a plutôt plu d'ailleurs. Non pas à cause de son contenu, évidemment. Il est très regrettable que les droits de l'homme soient les oubliés des relations franco-algériennes. Mais ce qui m'a plu, c'est la formule qui l'explique : un angle mort des relations diplomatiques. Et si ça m'a plu, c'est que typiquement, voilà bien une formule journalistique, une image assez frappante, mais encore relativement neuve. Ce n'est pas encore un cliché. Est-ce qu'un jour ça en sera un ? Bah, il est trop tôt pour le dire, mais pour l'instant, l'expression a le charme de la nouveauté et elle fait un peu réfléchir.
On l'a compris, cet angle mort, c'est ce qui échappe, c'est ce qui, étrangement, n'a pas sa place dans les relations officielles. C'est un sujet comme frappé d'invisibilité. On parle parfois d'ailleurs de points aveugles. L'image est différente. Elle a un petit peu la même signification. Alors comment comprendre notre angle mort ? On trouve cette formule au départ dans le vocabulaire de la circulation. On sait que les véhicules, les voitures, mais surtout les camions ont en général trois rétroviseurs : un à l'intérieur, légèrement au-dessus de la tête du conducteur et au centre de la cabine, et puis deux autres fixés sur les portières ou parfois sur les ailes. Et ces rétroviseurs sont donc de petits miroirs, des glaces, qui servent à voir ce qui est derrière. Rétroviseur, rétro en latin signifie en arrière. Et le plus souvent, il existe une petite zone à l'arrière du véhicule en question qui n'apparaît ni dans le rétroviseur intérieur ni dans les autres. C'est entre les deux, donc on ne la voit pas. Et c'est bien ça qu'on appelle un angle mort, une petite portion d'espace qui reste invisible. Et parfois, à l'arrière de gros engins, des camions, des bennes, des bus, un petit signal va alerter les piétons et les cyclistes. Attention, angles morts! Il faut se souvenir que le conducteur ne vous voit peut-être pas si vous êtes mal placés derrière le camion ou derrière l'autobus. Et mort dans l'expression « angle mort » a un sens figuré qui, évidemment, signifie ce qui n'existe pas. Et on comprend bien, à partir de là, comment fonctionne le déplacement de l'angle mort vers un usage figuré. Comment se construit la métaphore, c'est-à-dire l'image entre la France et l'Algérie? On parle d'économie, de commerce, de sujets militaires, de flux migratoires. Mais apparemment, on ne parle pas des droits humains comme si ce sujet était situé dans l'angle mort. On l'oublie, ou même, au pire, on l'ignore. Et ce mot « angle », il appartient à la géométrie, mais on le trouve dans d'autres significations. C'est aussi un synonyme de point de vue. Sous cet angle, c'est-à-dire avec ce point de vue, la proposition paraît avantageuse.
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