Compétir, c'est participer à une compétition. Mais où peut-on compétir ? En Afrique ! C'est essentiellement sur ce continent qu'on entend ce verbe. Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
En partenariat avec la Délégation Générale à la Langue française et aux Langues de France (DGLFLF).
Le mot de l'actualité, avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Voilà qu'on s'avance dans le printemps et traditionnellement, de nombreuses compétitions sportives se déroulent à cette période. Donc, il est temps de se préparer à compétir. Voilà ce qu'on peut dire. Voilà ce qu'on peut lire en français. Mais attention en français d'Afrique. En effet, c'est un mot qu'on ne trouve pratiquement que dans le français de ce continent, avec une sorte de panafricanisme : parce qu'on le trouve aussi bien dans des pays francophones d'Afrique de l'Ouest qu'en Afrique centrale. Mais en France, non, il n'existe pas. Ce qui est étonnant puisqu'il est parfaitement formé. Il se conjugue régulièrement comme un verbe du deuxième groupe. Ce qu'on appelle les verbes du deuxième groupe, ce sont ceux qui se terminent par -ir à l'infinitif, mais qui ont une base en -iss à certains temps : à l'imparfait, le participe présent. Alors compétir se conjugue tout à fait comme son paronyme compatir. Le paronyme, c'est un mot qui ressemble étonnamment à un autre. Bien que compatir n'a avec compétir aucun rapport, ni de sens, ni d'origine. Mais on peut très bien dire « je compétis aujourd'hui », « je compétissais hier ». Et le sens est clair : techniquement, c'est participer à une compétition. Les deux mots sont de la même famille et on compétit si on est dans une joute, un jeu, un concours quelconque. Si on est un compétiteur. Alors ce mot-là, il existe en France aussi bien qu'ailleurs. Et parfois, il est préféré à l'anglicisme challenger qui est montré du doigt par les puristes, bien qu'il dérive directement d'un vieux verbe d'ancien français qui est challenger. Mais c'est quand même un anglicisme aujourd'hui. Malgré tout, c'est étrange que ce mot compétir n'existe pas en français de France. Pourquoi ? Parce qu'il a des synonymes. Oui, il en a, mais pas tant que ça. On peut dire concourir, certes, ça exprime qu'on participe à une compétition, un concours, un championnat, une manifestation dans laquelle on sera classé. C'est ça qui est important. Mais si le mot est surtout en usage dans la langue du sport, on peut le trouver dans d'autres contextes. On peut compétir sur les marchés internationaux pour se tailler une place de choix. On peut compétir lors d'une élection. Compétir, c'est se mettre sur les rangs. Voilà une expression courante, moins technique. Est-ce qu'on pourrait dire concurrencer ? Certainement, mais le sens est un peu différent. On concurrence quelqu'un ou on concurrence une entreprise ou même un pays quand on essaie de le dépasser, de faire mieux dans un certain domaine. On essaye donc de le rattraper alors qu'au départ, il était devant. Ce n'est pas comme si on était tous à égalité sur la ligne de départ, ce qui est la situation évoquée par le verbe compétir. Donc concurrencer correspond plutôt à rivaliser. Et puis, puisqu'on est parti du verbe compétir, on peut aussi penser à compétitionner, qui existe aussi... en France ? Pratiquement pas. On le trouve au Canada francophone, on le trouve au Québec. Lui aussi est extrêmement bien formé. On peut considérer qu'il est un peu lourd. Il se termine en -er, il est du premier groupe comme la plupart des nouveaux verbes français, alors que compétir est plus intriguant, plus intéressant, parce que justement, il appartient à ce deuxième groupe.
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