Nicolas Sarkozy se pourvoit en cassation. Un vocabulaire très technique et très juridique. Que signifie vraiment cette expression ? Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
En partenariat avec la Délégation Générale à la Langue française et aux Langues de France (DGLFLF).
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture. Yvan Amar.
Nicolas Sarkozy, condamné en appel à trois ans d'emprisonnement dont un ferme pour corruption et trafic d'influence, se pourvoit en cassation. RFI nous l'apprend en utilisant ce vocabulaire assez technique. Et en effet, dans le vocabulaire de la justice, on dit qu'on fait appel ou même qu'on interjette un appel, mais qu'on se pourvoit en cassation. Alors on interjette un appel, c'est-à-dire, dans un français plus courant, on fait appel après une première décision rendue en première instance, c'est-à-dire après un premier procès on peut demander une deuxième décision de justice. Et lorsque l'appel a été prononcé, on peut encore demander un autre avis si l'on se pourvoit en cassation. Se pourvoir, c'est un verbe dont le premier sens est tout simplement se munir, se débrouiller, pour être pourvu. Mais le verbe a également une signification juridique, c'est recourir à un tribunal particulier.
Donc, on se pourvoit en cassation pour remettre en cause un premier jugement ou un jugement en appel. Et cette Cour de cassation, elle a la possibilité de casser le jugement. On comprend bien l'origine de ce mot, cassation, avec cette image forte, violente : on n'invalide pas, on ne remet pas en cause, on casse. Et c'est une représentation symbolique qui fait penser à certaines cérémonies. Par exemple, on casse publiquement, ou on cassait parce que la tradition s'en est perdu, on cassait l'épée d'un officier s'il était dégradé, s'il était condamné pour haute trahison. Ainsi s'explique le mot cassation, qui n'a qu'un emploi juridique en français : on peut casser un mariage, l'emploi est rare, on peut casser un jugement.
La Cour de cassation, c'est donc la plus haute juridiction française. Il n'y a qu'une seule Cour de cassation alors qu'il y a de nombreux tribunaux de première instance, de nombreuses Cour d'appel. Mais la Cour de cassation n'a pas exactement le même rôle que les autres tribunaux. Elle n'est pas constituée, comme on dit, de juges du fond. C'est-à-dire qu'elle ne se prononce pas sur la réalité d'une affaire, sur ce qui oppose les parties, elle se prononce sur le bien-fondé de la décision qu'a rendu la justice. On sait qu'on a des profs de profs, ceux qui enseignent à des enseignants comment bien enseigner. On a, comme on dit familièrement, des flics de flics, c'est-à-dire l'Inspection générale des services de la police qui s'assure que les policiers ont bien fait leur travail, n'ont pas abusé de leur fonction. Eh bien, la Cour de cassation, elle est constituée de juges de juges. On juge si les juges ont bien jugé, ont bien appliqué la loi, si tout a été fait dans les règles. Et si la Cour prononce une cassation, donc, eh bien l'affaire est renvoyée et devra être rejugée. Et la Cour de cassation est vraiment une invention de la Révolution. Elle succède à ce qu'on appelait le Conseil des parties, mais elle a été instituée en 1790, tout début de la Révolution française.
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