Au lendemain d'une grève importante, la question est posée dans de nombreux médias : en quoi ces perturbations ont elles impacté la vie des habitants ? Il est question de l'incidence que cela a pu avoir sur la vie quotidienne. L'incidence, c'est-à-dire la répercussion. Le mot impact a un sens fort : il indique au départ un choc net, direct. D'où vient ce mot ? Comment est-il employé ? Écoutez les explications d'Yvan Amar dans cette chronique, avec sa transcription.
Le mot de l'actualité avec la délégation à la langue française du ministère de la Culture.
Yvan Amar.
Au lendemain d'une grève importante, la question est posée dans de nombreux médias : en quoi ces perturbations ont elles impacté la vie des habitants ? C'est-à-dire comment ces perturbations ont influencé, ont affecté la vie des gens ? Il est question donc de l'incidence que cela a pu avoir sur la vie quotidienne. L'incidence, c'est-à-dire la répercussion. Mais attention, on pense qu'il y a une répercussion négative. Parce que si une situation désirable devait résulter de cette journée d'action, On n'utiliserait pas le verbe impacter ou le nom impact. On dirait que la grève a dynamisé, a regonflé, a boosté peut-être la vie de tous les jours. « Boosté », c'est une langue familière, c'est vrai, mais on l'entend. Alors que si on utilise le verbe impacter, c'est que ça a eu une conséquence négative. La plupart du temps, d'ailleurs, indirecte parce qu'il s'agit d'un choc en retour, d'un effet secondaire. Un effet retard presque. Ce qui est étrange d'ailleurs, parce que le mot impact, il a un sens fort et il indique au départ un choc net, direct. Impacter : c'est un verbe tout récent en français qui dérive du mot impact, un mot assez récent aussi, et c'est un cliché journalistique plutôt à la mode qu'on entend dans des langages officiels ou dans des langages surveillés, beaucoup plus que dans la conversation courante. Et il s'agit d'un emprunt au latin qui date de la fin du 19 ème siècle, et il est assez étonnant par son orthographe; parce qu'en français, rares sont les mots qui se terminent par ces trois lettres A, C, T. Il y en a hein ! On peut penser par exemple à artefact, mais là c'est différent. On n'est pas devant un emprunt au latin avec un mot francisé. C'est un mot latin artefact sans aucun changement, qui est entré tel quel dans la langue française. Et c'est clairement l'impression que nous donne le mot impact. Sauf que dans ce cas-là, c'est faux. Parce que impact n'est pas un mot qui existe en latin classique. On a impactus, on a impactum mais impact c'est une création totalement française qui s'explique aussi probablement par la ressemblance avec l'adjectif compact ; qui d'ailleurs a donné naissance lui aussi à un verbe compacter. Mais enfin compact, c'est un adjectif, ce n'est pas un nom. Revenons à notre impact qui donne l'idée d'un choc violent et surtout d'un choc ciblé qui frappe un point précis. D'ailleurs, les premiers emplois du mot se relèvent plutôt de l'expression point d'impact qui marque le lieu de la collision. Donc l'impact est un coup fort qui endommage. Le mot ensuite a pris un sens plus psychologique. On dit qu'un argument a un impact fort. Une campagne de publicité peut aussi avoir un gros impact sur le public qu'elle vise. L'impact, c'est donc ce qui frappe les esprits, ce qui impressionne et ce qui laisse une impression relativement durable. Il ne s'agit pas tellement de convaincre par la raison, mais de faire résonner l'imagination.
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